Le sujet m'intéresse mais je suis mal barrée : l'écriture pour moi n'est pas de l'ordre du désir, elle est nécessité.
Elle l'est devenue à l'instant même où je m'y suis autorisée, de façon fort tardive puisque j'étais à une semaine de 40 ans et que c'était ma grande amie, l'âme sœur, qui après plusieurs années d'un très patient travail pour m'en faire approcher, jugeait le moment opportun pour me botter les fesses et me dire Mais regarde, patate, tout y est.
Et la patate a failli répondre par retour de message, Mais tu es folle !, je ne sais pas, moi. Seulement avant, par respect, elle a essayé de suivre la piste indiquée, des bribes préexistantes, une façon de les rassembler, et s'est rendue compte que ça dessinait quelque chose et qui ressemblait bien un peu à ce qu'on lisait dans les livres en papier.
Ça écrit dans ma tête presque à flux continu, il faut vraiment que je sois très concentrée sur quelque chose à vivre, par exemple très malade, très en danger (1) ou très amoureuse, pour m'en déconnecter. J'avais eu auparavant une vie trop peu confortable, trop laborieuse et trop chargée pour en prendre conscience. Écrire consiste pour moi à syntoniser la bonne longueur d'onde afin de n'écouter qu'une émission et une seule à un moment donné, me mettre au clavier et retranscrire. C'est donc un travail. Il est parfois pénible et risqué, ce que je cherche à capter vient de très loin et m'apprend des choses que j'aurais préféré ignorer ; d'autre fois elles sont plaisantes, et qui me permettent de comprendre ce que je vois et vis en y mettant les mots et parviens à en rire même si sur l'instant j'avais failli mal aller.
Souvent c'est le sentiment que les histoires, les récits, préexistent et qu'ils cherchent désespérément quelqu'un par qui passer afin d'être communiqués. Je suis un récepteur-ré-emetteur.
Aucun désir là-dedans. À moins que dans un second temps, celui de filtrer, trier et affiner afin de rendre l'émission pour les autres écoutable.
Si je reste trop longtemps sans faire mon boulot, toutes les phrases traînent et s'entassent et je me sens confuse jusqu'aux plus simples gestes de la vie quotidienne.
Depuis qu'on m'a poussée dans le bassin des mots, j'écris pour surnager. Il était grand temps que quelqu'un le fasse, sur le bord, j'étouffais.
(1) ou l'un des miens, surtout s'il s'agit des enfants.
PS : Mon "500 mots" est très à la louche, on dirait