Dans la marge, par Fred
Quand j'étais môme, j'ai lu et relu les "Albums de la Jeunesse Joyeuse" (sic).
Quand j'étais môme, j'ai lu et relu les Pieds Nickelés. Les Pieds Nickelés, c'est… comment dire ? C'est le pied ! Et c'est nickel ! Croquignol, Ribouldingue et Filochard, trois canailles sympathiques toujours en quête d'une nouvelle combine pour ne surtout pas gagner leur vie honnêtement. Ils déploient des trésors d'ingéniosité pour monter des coups fumants, et souvent fumeux. Ils font des efforts incroyables pour n'avoir pas à faire d'efforts ! Un vrai guide pratique pour libertaire en herbe ! Un genre de manuel des Castors Juniors pour graine d'ananar. A côté de mes jolis cahiers de bon élève, tout propres sous leur protège-cahier, existait un autre monde… Une marge… Chaque début d'album les voyait fauchés - plus de flouze les aminches, plus d'artiche les poteaux ! - mais, après avoir inventé toutes sortes d'escroqueries de plus ou moins grande ampleur, après avoir filé de justesse sous le nez de la maison Poulaga, après s'en être mis plein les fouilles - cette fois, c'est la fortune, les frangins ! - ils finissaient évidemment fauchés comme devant ! L'enjeu était donc ailleurs : rester dans la marge, mettre tout en œuvre pour résister à… quoi ? La réussite, la norme, le conforme. L'insertion, dirait-on aujourd'hui. Renouveler sans cesse l'aventure, l'inconnu, le précaire, le bancale, le bricolé, le vivant. Jamais se poser, jamais s'installer, quitte à avoir le ventre creux, toujours commencer, recommencer. Jamais de vrai point final. Vivre de points d'interrogation, de points d'exclamation. De points de suspension…