Bonsoir Patricia,
Si longtemps déjà que "People who knock on the door" est à mon chevet, à tous les sens du terme, et que je n'ose pas. 26 ans, je crois, bientôt 27. À l'époque, je n'imaginais pas qu'on puisse écrire à ceux qui écrivaient. Ma planète s'appelait banlieue et à peine Paris, mais seulement pour les cours, dormir et potasser. Ceux qui créaient les livres habitaient une autre galaxie. Il n'existait pas encore l'internet pour les communications interplanétaires. De toutes façons j'aurais craint de déranger. Je ne remercie pas mes parents d'avoir ajouté à une forme de timidité naturelle, trois surcouches (in)dé(lé)biles de principes d'effacement.
Il tombe que comme Arthur, j'étais quelqu'un qui étudiait sérieusement. Les étudiants sérieux ne sont pas du bois dont on fait ordinairement les héros de roman. Comme lui j'avais trouvé le grand amour du premier coup et qui m'avait quitté ainsi que le fait Maggie envers lui. Et une structure familiale qui présentait certaines similitudes, quoi que non religieuses, avec celle dont il souffrait. L'identification avait fonctionné plus qu'avec aucun autre. Au point de m'aider au plus noir du chagrin d'amour : oui il est normal de n'en plus pouvoir manger sinon de façon fractionnée, oui il est normal d'être à ce point abattu. C'était mon premier, je n'en savais rien.
J'ai acquis depuis une certaine expertise.
Ce n'est qu'à mesure que je m'approchais de l'écriture que j'ai compris combien au delà d'un récit et de personnages qui me tenaient à cœur, se trouvait une œuvre, un travail remarquable d'équilibre narratif. Cet art de distiller les quelques détails nécessaires à la vie d'une scène, jamais un de trop, le respect des personnages, jusqu'aux plus secondaires et qu'ils soient issus du quotidien et que ce soit ce qui advient qui mérite transmission. Et enfin votre humour à froid, jamais insistant.
Depuis fort longtemps je n'ai plus l'âge d'Arthur, mais ma vie n'est qu'un éternel recommencement, et je n'ai jamais su me départir ni de mon sérieux au travail ni de mon engagement profond dès qu'il s'agit de sentiments, alors je suis revenue vers lui souvent.
Ces derniers jours, j'ai dû à nouveau le retrouver. J'ai beau connaître à force certains passages par cœur (1), la magie opère : votre écriture possède l'efficacité calme qui fait qu'on y est.
Au fil des ans, à mesure que dans nos sociétés le conservatisme reprend le dessus le côté militant me séduit davantage. Pour ça aussi votre livre offre apaisement.
Il n'y a qu'au 11 septembre 2001 (2), à la mort de mon père, et quand l'amie, mon âme sœur, m'a quittée qu'il n'a rien pu faire. C'est peu en 26 ans.
Il était donc plus que temps que je vous dise merci. Je profite que ce soir un messager de luxe s'apprête à vous rejoindre pour le charger de transmettre. Je sais qu'il voudra bien. Mon «Shoe Repair» à moi s'appelle L'Attrape-Cœurs.
Be seing you
some grateful Gilda
(1) Hélas pour ma vie amoureuse.
(2) Vous n'étiez pas là, je vous expliquerai.
Merci, Gilda, de me donner envie de lire le livre que vous évoquez si bien.
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