dimanche 20 septembre 2009

Réveils ("Contretemps", dernière) - par Lilian Saint-Gaudin

Comme je n'avais pas donné de date limite pour l'exercice "Contretemps", je publie celui-ci, mais c'est la dernière fois, hein ? Maintenant, faut faire les autres. Et pas dépasser la date limite, hein ? Hein ? Sinon je vais pas m'en sortir, moi... ;-) (MW)

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C’est la pluie qui le réveilla.

Il sortait tout juste de la réunion de coordination du groupe marketing d’ASSUR’TOU, et c’est en sortant de l’immeuble que la pluie s’abattit sur le trench dans lequel il se croyait protégé des éléments, transformant sa raie sur le côté, il le voyait d’un œil fatigué dans une vitre, en placard qui lui tombait de tous les côtés à la verticale.

La pluie l’imbiba aussitôt et sa noyade lui rappela ce qu’il venait de se passer : Giles Gerti, son manager venait littéralement de l’humilier devant l’équipe entière. Il le voyait à ses collègues qui en sortant évitaient son regard.
« Et c’est avec des idées pareilles que tu veux lancer la campagne qui est censée relancer la branche assurance-vie? Non mais ce sont des idées de branleur, ça ! Et tu as 15ans de boîte ? T’as toujours des idées du même type ? Non mais continue comme ça et tu finiras dans un placard quelconque où tu pourras faire office d’étagère. Là au moins, pas besoin d’idées » Il avait baissé la tête et cherché à cacher une larme. Elle ne passa pas inaperçue. La suite de la réunion fut longue et aveugle. Il ne se réveilla que sous la pluie.
En hiver à la sortie des bureaux, c’étaient les lumières qui dominaient, des halos partout qui tentaient inutilement de se cacher derrière la brume. D’habitude il trouvait ça plutôt gai : Noël approchait. Mais là il était complètement…à côté. Et son manteau qui ne lui servait à rien. Il le retira lentement pour le poser par terre passant sa mallette d’une main à l’autre. Sa mallette…elle dérangeait d’ailleurs ; il la posa alors sur son manteau et se cala les mains dans les poches. Il voulait perdre ses larmes et leva son visage cers le ciel.
Il ne pleurait plus, il s’en aperçu immédiatement. La pluie, le ciel le soutenaient. Il ne pouvait plus pleurer. Il était réconforté. L’eau était avec lui. C’était lui qui l’avait appelée. Et s’il lui commandait. Un sourire se dessina entre les lampadaires du parvis. Quel con, il le savait, pas lui mais Giles. Comment avait-il pu ? Comment s’était-il adressé à lui ?

Il se dirigea vers l’entrée du RER comptant les gouttes qui s’abattaient sur ses pommettes. Demain il lui ferait voir, il lui rabattrait sa jeunesse, ses certitudes, son école d’arriviste, son management qui fleurait bon le dégraissage et le suicide de masse. Le bruit sur la vitre de son wagon ne faisait que confirmer sa certitude : chaque goutte était un point d’exclamation à sa révélation : c’était fini tout ça. Le chemin qui luisait sous ses pas, reflétait sa célébration que lui rendaient les lampadaires. Et en se couchant la même idée l’amenait vers son sommeil lumineux. Enfin !


C’est la pluie qui le réveilla.

15 minutes avant la sonnerie du réveil. Il se leva avec une impression de martellement. Le vent projetait la pluie sur les vitres de son appartement. Les lumières sur le trottoir n’arrivaient pas à révéler les employés plus matinaux que lui qui se protégeaient tant bien que mal sous leur parapluie à contre-sens.

Il posa son front contre la vitre et se vit dehors, dans une heure subissant les éléments. Certainement que son pardessus et sa mallette étaient à l’accueil peut-être trouvés par le vigile. Comment allait-il expliquer qu’il les avait oubliés devant l’immeuble ? Il espérait que Giles ne serait pas de trop mauvaise humeur aujourd’hui. Il se leva prendre sa douche.

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