Lost in translation – Sofia Coppola,
2003.
Un
des rares films que je suis allée voir sans en connaître l’histoire. Ma tante
et mon cousin m’ont proposé d’aller au ciné, j’ai dit oui et voilà. Cela peut
paraître anecdotique mais je suis convaincue que cette séance en terrain
inconnu n’est pas pour rien dans l’impact que ce film a eu sur moi.
C’était
un soir d’hiver. J’aime l’hiver, j’aime le cinéma le soir. Chaque fois que je
m’installe dans une salle de cinéma, je savoure ce bonheur qu’est le cinéma. Si
l’on me demandait s’il fallait choisir entre le cinéma et la littérature, je
crois que je choisirais le cinéma. Ce serait un sacrifice insurmontable
cependant je n’imagine pas vivre sans lui.
Lost
in translation est selon moi la quintessence de ce qu’il peut se passer de plus
beau entre deux êtres. Les doux moments de l’attirance, l’évidence grandissante
de la connivence, la tendresse et la bienveillance s’installant au gré des
rencontres. Il n’est nul besoin de nommer ce qui unit Charlotte et Bob, peu
importe. Ce qu’ils vivent est rare et précieux et ils le savent.
La
scène dont je garde un souvenir très fort est celui de leur première sortie. La
musique qui invite à vivre ce qui s’annonce (Chemical Brothers - The state
we’re in), l’effervescence, la promesse d’une nuit qui restera… Combien de fois
avons-nous vécu semblable transport, ce que l’on pourrait nommer le moment
parfait ?
J’ai
été troublée par la délicatesse de l’approche de Sofia Coppola. Tout passe par
les regards, les silences et l’humour car les deux protagonistes en sont tous
deux pourvus. Et puis la pudeur… qui seule permet au spectateur d’éprouver la
force emprunte de retenue de la naissance de sentiments.
Une
histoire simple – Claude Sautet, 1978
J’ai
gardé en mémoire, ce jour de novembre 1978, ce jour où je découvre dans les
pages de Télé 7 jours, une photo de Romy Schneider dans le dernier film de
Claude Sautet Une histoire simple. Je me souviens avoir lu
l’article plusieurs fois. Je suis émerveillée par le fait que Claude Sautet ait
offert ce film à Romy pour ses quarante ans. Quelle femme doit-elle être pour
qu’un réalisateur lui offre un film ! Je lis dans ces une ou deux pages
que Romy est au sommet de son art, que quarante ans est l’âge de la maturité et
de la beauté. Je lis aussi que l’héroïne, Marie, n’en a pas fini avec l’amour
et la maternité.
J’ai
dix ans à ce moment-là, et je crois que quand j’aurai quarante ans, je serai
vieille.
Je
savais que je ne verrai pas ce film au cinéma, qu’il me faudrait attendre la
diffusion à la télé et qu’au moins d’ici là, j’aurais peut-être l’âge de le
regarder. Ma mère a déjà refusé catégoriquement que je voie Le vieux
fusil. Une histoire simple
devient le film espéré, il incarne mon amour naissant du cinéma et bien au-delà
de ce que je peux en comprendre sur le moment, il est ébauche ma vision de
femme. Romy et plus encore, le regard de Claude Sautet sur Romy, va décider de
ma personnalité, de mon tempérament. Je porterai très haut cette estime de la
femme et même si à ce moment-là, je ne pouvais imaginer quelle femme je
deviendrais, je savais intuitivement celle que je ne deviendrais pas.
J’éprouvais
déjà cette fragilité, cette peur du temps et l’importance du regard de l’autre.
J’espérais que l’amour et l’amitié ne me passeraient pas à côté car déjà, je
m’en faisais une haute idée.
Je
ne me souviens plus de la première fois que je vis ce film. C’est curieux mais
l’explication réside peut-être dans le fait que je l’avais vu avant même de
l’avoir vu et que depuis, j’ai dû le regarder plus de six ou sept fois.
En
2008, j’ai eu quarante ans. J’ai eu quarante ans l’année où Romy en aurait eu
soixante-dix.
J’ai
revu ce film en réalisant, que jamais la petite fille de dix ans qui lisait la
critique d’ Une histoire simple dans Télé 7 jours, ni même celle de
vingt ou de trente, ne s’était imaginé avoir l’âge de Marie un jour, pouvoir
dire au moment de la vision du film qu’elle pourrait être Marie.
Alors,
je me prends à imaginer le petit rôle que j’aurais pu avoir dans ce film. Qui
aurais-je pu être au côté de Marie, Gabrielle, Esther, Anna et Francine ?
Aurais-je été de celles qui courraient après leur indépendance ou bien femme
délibérément heureuse d’être mère et pas si mal lotie ? À cette question,
il est forcément difficile de répondre mais ce que je sais, c’est que j’aurais
passé pas mal de temps dans les cafés avec Marie, paquet de cigarettes posé
devant moi. C’est là que je les aurais retrouvées, que mon chemin aurait croisé
celui de Georges, Serge, Jérôme… mon fils aurait l’âge de Martin… je serais
cette femme de quarante ans des années 2000 mais qui l’était devenue par
anticipation à la fin des années 70. Mes amies, sont celles-ci, dans la cuisine
de cette grande maison de campagne, je prépare sûrement une vinaigrette ou
monte des blancs en neige en écoutant Anna assumer son indépendance. Je suis un
peu comme Marie, pas très bavarde, mais tirant leçon de ce que j’entends et
tentant de ne pas juger trop sévèrement ce que je ne comprends pas. J’ouvre ces
grandes armoires pleines de draps, dans ces chambres pleines de lits… De là
date mon rêve de maisons pleines d’amis. Je conduis une Simca 1100, prend la
pilule depuis mon avortement et je travaille comme les autres sur une table à
dessin. Je ne m’appelle pas Sophie mais plutôt Nicole, Danielle ou Françoise…
mon mariage bat de l’aile, le divorce devient populaire pourquoi pas moi ?
An
affair to remember – Leo Mccarey, 1957
Incontestablement
ma comédie romantique préférée. Le film que je regarde seule, sous une couette
devant la cheminée quand j’ai un peu le cafard ou qu’il ne m’est rien arrivé
d’exaltant depuis trop longtemps. Son titre français Elle et lui. C’est
un remake de A love affair que ce même réalisateur avait réalisé en 1939. Je ne
connais pas les raisons qui l’ont poussé à refaire son film presque vingt ans
plus tard.
Un
film pour les intraitables romantiques.
Cary
Grant, Deborah Kerr… quel couple de cinéma !
Curieusement,
tout ne plaît pas dans ce film. Par exemple, la scène de chant des enfants est
longue et caricaturale. La grand-mère de Nickie-Cary manque un peu de
vraisemblance.
Ce
que j’aime dans ce film, c’est le déroulement, l’impossibilité pour les
protagonistes de résister à leurs sentiments. Pour tous ceux qui ne l’auraient
pas vu, je ne parlerai pas de la fin… superbe de romanesque.
Malgré
son indéniable côté fleur bleue, ce film est bourré d’humour, de quiproquos
amusants. Ces deux-là ne se prennent pas trop au sérieux non plus.
Ma
scène préférée, Terry-Deborah de retour à New-York découvrant Nickie sur son
écran de télévision et n’éprouvant pas le courage de poursuivre sa relation
avec son fiancé qui comprend ce qui se passe.
Une
deuxième scène préférée : le baiser qu’on ne voit pas.
Certains
trouveront ce film quelque peu désuet. Avec moi, ça marche à tous les
coups !