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mercredi 18 juillet 2012

Je viens de terminer deux livres

Je m'étais engagé à les donner aux éditeurs le 15 juillet, dernier délai. J'ai rendu le premier le 12, le second le 17. 
Il y a un essai (L'esprit du shaman – Dr House, une éthique du récit) et un roman (originellement intitulé La Veillée). L'un pour Boréal (Montréal), l'autre pour P.O.L (Paris).
En principe, ils seront publiés à l'automne. (Ainsi qu' un Petit éloge des séries télé, chez Folio). 

Ces dernières semaines, j'écrivais quatorze ou quinze heures par jour. Je dors moins depuis plusieurs mois. Je me réveille au bout de 3 ou 4 heures et parfois ça me suffit. L'âge, sans doute.

Ça ne me fatigue pas d'écrire autant, quand je suis dans le livre. Je veux dire : quand je suis plongé dedans au point de ne pas vouloir en sortir.

C'est une expérience nouvelle que je viens de faire : écrire deux livres en même temps ou presque. Qui plus est, pour le Shaman, je regardais tout House en DVD, en parallèle. Il y avait toujours de nouvelles choses à découvrir dans tel ou tel épisode.

J'avais un planning serré, mais je ne me suis pas affolé. J'ai quand même pris mon temps, même dans l'urgence.
L'âge, sans doute.

Evidemment, on ne peut pas finir deux livres en même temps, on peut les écrire en alternance (c'est ce que j'ai fait et ça m'a bien aidé, car quand j'étais fatigué de l'un, je me consacrais à l'autre) mais il arrive un moment où on est obligé de se consacrer à l'un des deux pour le finir. Ou peut-être qu'on ne peut plus le lâcher, parce qu'on approche de la fin, alors on laisse l'autre, temporairement.

Le Shaman est la première monographie que je consacre à une série contemporaine ; et la seule monographie avec Mission : Impossible (Huitième Art, 1993), mon premier livre consacré aux séries (mes autres bouquins sont consacrés au genre). Le Shaman était à la fois une commande (Robert Lévesque, chez Boréal, m'a demandé un livre pour sa collection) et un désir : j'ai envie d'écrire sur House de manière étendue depuis le début de la série en 2004.

Je suis très heureux de l'avoir écrit même si je pense que ce genre de livre est par essence voué à une vie éditoriale très réduite malgré son sujet. Car le grand public ne s'intéresse à une série que lorsqu'elle est à l'antenne. Il ne s'y intéresse plus (ou alors, seulement ses fans les plus acharnés) une fois qu'elle n'est plus diffusée. D'ailleurs, les livres centrés sur une série sont publiés, le plus souvent, pendant leur production. Jamais après. En ce qui concerne House, la série s'est achevée en mai 2012 aux Etats–Unis, et la dernière saison a déjà été diffusée au Québec. Elle sera diffuséen en France en 2013 mais comme je dis beaucoup de mal de TF1 dans le bouquin, je ne compte pas sur la chaîne (ou sur les magazines de télévision) pour en parler. Bref, sur le plan du marketing, ça restera un livre confidentiel.

Ça ne m'attriste pas : je pense que le public de ce genre de livre est, de toute manière, limité. Et je ne l'ai pas écrit en espérant qu'il deviendrait un best-seller (il ne parle pas assez des acteurs et des histoires sentimentales de la série pour ça), mais parce que je voulais mettre sur le papier une hypothèse concernant la figure symbolique universelle d'homme-médecine "premier" incarnée par le personnage principal.

Je voulais aussi dire que derrière House, je vois un auteur - le créateur et principal scénariste de la série, David Shore - à travers les thèmes abordés par des épisodes-clé (pilote, dernier épisode et une douzaine entre les deux) et leur présence ferme et cohérente tout au long de la série. C'est d'autant plus net (et singulier) que cette unité et la présence de l'auteur, en général, sont surtout visibles dans des séries du câble, de production moins intensive et plus posée (Oz, The Sopranos, The Wire, Mad Men, Justified…)
A travers House, je suis parti à la recherche de David Shore, un peu comme Stanley part à la recherche de Livingstone ou comme le personnage de Marlow part à la recherche de Kurtz Au cœur des ténèbres.
Je n'ai pas pris contact avec Shore, j'aurais pu le faire (ou du moins, essayer) mais j'ai choisi de travailler à partir de l'œuvre, et non à partir des propos de l'auteur, qui s'est exprimé abondamment par ailleurs, dans des interviews à droite et à gauche.

J'ai voulu donner ma lecture de House et je pense y être parvenu.

L'autre projet était littérairement parlant plus ambitieux, mais n'est pas sans relation avec mon intérêt pour House.

C'est un roman plus court que mes romans antérieurs, dont le sujet apparent est le suicide assisté. Le personnage principal, un médecin dans une unité de traitement de la douleur et de soins palliatifs, aide à mourir les soignants qui font appel à lui.

Ça, c'est le cadre général. Les thèmes sont ceux de mes autres romans : l'amour, la mort, la famille, la transmission. Il y est plus question des hommes que des femmes (même si elles y jouent des rôles importants, comme toujours). C'est une manière d'annoncer Les voies des hommes que j'écrirai l'an prochain, je pense. 

Ce roman était une expérience nouvelle pour moi, pour plusieurs raisons.
D'abord, parce que je voulais écrire un roman court, dans un style plus resserré, plus condensé, plus bref, plus allusif que mes romans précédents.
Ensuite parce que je me suis risqué à parler de quelque chose dont je n'ai pas d'expérience factuelle approfondie -  même si je connais beaucoup de choses sur le sujet, comme la plupart des soignants qui se sentent concernés, je n'ai jamais été médecin de soins palliatifs.

Bref, c'était une expérience nouvelle tant par la forme que par le fond sur lequel je m'appuie, qui est ici plus émotionnel et intuitif qu'intellectuel et fondé sur des faits. Ce n'est pas un roman sur l'euthanasie, même s'il en est longuement question. Si on en parle, j'imagine que c'est le mot qui reviendra le plus souvent et contribuera à sa réputation, bonne ou mauvaise.

Je viens de recevoir un coup de téléphone de Paul Otchakovsky-Laurens qui a lu le livre ce matin d'une traite et m'a appelé pour me dire ce qu'il en pense (du bien…). Il m'a suggéré de changer le titre initial, La Veillée, qui est un peu trop vague et déjà adopté par de nombreux livres. Comme Paul en a eu l'idée, et je suis heureux et reconnaissant qu'il ait pensé à ce titre, ce roman s'intitulera désormais, en référence à une expression récurrente dans le texte


 En souvenir d'André

Il sera en librairie le 4 octobre.

Et maintenant, je prends des vacances bien méri—non, j'ai encore du travail, une traduction, des articles, une nouvelle et je ne sais plus quoi encore...  Damn ! A writer's work is never done.

Mar(c)tin


13 commentaires:

  1. J'aimais bien "La Veillée".
    Avec "En souvenir d'André", on est déjà dans le sujet, on est tout de suite pris par quelque chose (la mort, au moins symbolique, de quelqu'un).
    Bon, POL a toujours raison.

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    1. "La veillée" est un beau titre, mais trop vague : il y a une flopée de bouquins qui s'appellent comme ça. J'ai hésité environ trois minutes avant de me dire qu'il a parfaitement raison. Vous verrez quand vous lirez le livre. Ce titre est aussi juste que "La maladie de Sachs" l'était pour un livre intitulé initialement "La Relation".

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    2. "La maladie de Sachs" 'est un titre sublime, je l'admets.
      Et qui reflète bien le contenu du livre.

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  2. Quelle pêche !
    Et quelle endurance !
    Je vous imagine entre le bureau et l'écran de télé... mais il faut aller prendre l'air un peu !

    Je blague (vous devez avoir déjà des garde fous chez vous) parce que c'est chouette d'avoir des nouvelles d'un travail en cours, et de savoir qu'on pourra le lire bientôt.
    Comme des nouvelles sporadiques d'un vieil ami qui daigne enfin en donner ;-)

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    1. Oui, on me dit d'aller prendre l'air... J'aime pas l'air. Je n'aime que les gens...

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    2. Pourtant, sur votre page facebook, il y a un banc avec un jardin bien attirant....

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    3. C'est le jardin de deux amis. Un endroit paradisiaque, effectivement. Mais aller là bas, ça n'était pas "prendre l'air", c'était aller les voir...

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    4. Nous, ça nous fait prendre l'air, d'une certaine façon.
      J'essaie de faire ressembler mon jardin à la photo, mais ici, il fait trop chaud, la verdure brule, l'herbe est jaune...C'est dans quelle région? Pas en France?

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  3. alors félicitations pour ces deux nouveaux-nés qui sont bien frères mais pas jumeaux...
    Pour moi "En souvenir d'André" ressemble plus à une épitaphe ou à une dédicace qu'à un titre (mais ô qui suis-je pour me permettre ce genre de remarque ;-)) et il est aussi très différent du genre de vos autres titres...
    Cependant je le lirai avec plaisir, le sujet m'intéresse!
    Reprendrez-vous les exercices d'écriture sur ce blog?

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    1. Vous avez raison, Adrienne, doublement. Car si j'aime cet autre titre c'est AUSSI parce qu'il est différent de ceux que j'ai publiés auparavant. Comme le livre - du moins je l'espère.
      Je ne vais pas reprendre les exercices d'écriture sur le blog, je m'en expliquerai bientôt.

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  4. Quel plaisir de savoir que je vais pouvoir de nouveau vous lire.
    Le livre sur House n'intéresse beaucoup, parce que je regard la série depuis le début, et bientôt jusqu'à la fin, mais que depuis trois ans je regarde plus par habitude que par plaisir. Et puis parce que, même si je ne suis pas toujours d'accord, et surtout parce que je ne suis pas toujours d'accord, j'aime beaucoup vos livres qui parlent de séries. C'est pourquoi j'attend aussi le petit éloge chez folio.

    Bien sûrje lirais aussi le roman, comme j'ai toujours lu vos romans depuis La Maladie de Sachs (que j'ai relu au moins une fois par an depuis sa sortie). Le sujet, en plus d'être, mais c'est je le pense un hasard, d'actualité, est fort. Je ne veux pas préjuger de ce que sera ce livre, mais je suis certain qu'il sera traité avec justesse.

    J'attends donc avec impatience l'automne, qui sera plus que jamais ma saison préférée.

    Amicalement.

    AJF

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  5. Bravo !
    bonnes vacances !!
    et on attend que les livres soient publies maintenant :)

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  6. Hmmm, le descriptif de "En Souvenir d'André" me donne envie de relire "La Méthode Schopenhauer" de Irvin Yalom, ouvrage parlant de fin de vie, de finitude, de transmission aussi et de thérapie de groupe (pas Balint, mais quand même un groupe).
    Je pense aussi au "Livre Tibétain De La Mort et De La Vie" de Sogyal Rinpoché, que j'ai consulté pour voir ce que les bouddhistes avaient à dire sur le sujet. Une fois mis le pied dedans, je me suis fait embarquer dans les sables mouvants d'ouvrages bouddhistes pendant un bon paquet de mois.
    Tout cela pour dire que j'attends le 4 Octobre avec impatience, et que, comme d'habitude, je ne ferai qu'une bouchée de votre livre.
    En passant, je recommande à quiconque lit ce commentaire "Et Nietzsche a pleuré", du même Irvin Yalom. Pour en faire un résumé à la Daniel Pennac, je dirais que c'est l'histoire de Nietzsche qui fait une psychothérapie. Mais pas que. Le livre met un peu de temps à démarrer, mais c'est pour mieux se prendre une baffe émotionnelle à mi-parcours.

    Quant à "Les Voies des Hommes", s'agit il du cousin du "Chœur des
    Femmes" ?

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