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dimanche 8 mai 2011

Une lueur dans la nuit - par Christina



Un studio, rue Blainville, Paris 5ème.
Ce soir, j'ai rendez-vous avec toi.
Tu vas jouer avec ton orchestre dans une boîte chic.
J'ai intérêt à me faire belle.
En plus, comme tu rentres de voyage tu y vas de ton côté, directement. Tu as déjà ta clarinette avec toi. Je te retrouverai donc là-bas. Trois semaines que nous ne nous sommes pas vus, embrassés, aimés…
Je suis folle de joie à l'idée de te revoir enfin. J'ai nettoyé tout l'appartement, enlevé toute trace de mes amants (c'est long trois semaines sans toi), rempli le frigidaire, changé les draps et cætera.
Je commence par ma toilette.
D'abord, un merveilleux bain moussant.
Me fait penser à Cléopâtre.
Moins le lait d'ânesse !
Mais doux, si doux…
Ensuite, le maquillage. Je reste nue, il fait trop chaud dans le petit studio. La nuit tombe. On appelle ça "entre chien et loup" sauf que le loup n'y est pas encore. Quelques applications de fond de teint plus tard, il est temps de se vêtir.Comme tu aimes. Joli soutien-gorge. Mignon corsage en dentelles. Jupe gitane. Sequins. Et, sous la jupe gitane, le plat de résistance. Porte-jarretelles et bas de soie. Avec une petite culotte en soie itou pour couronner le tout.
Tu aimes le contact de la soie sous ta main.
Et surtout la douceur de la fine bande de chair entre les deux soies. Celle des bas et celle de la culotte, juste en haut de la cuisse. La peau est si fine, presque transparente, et toi… tu fonds.
Et moi, j'aime le rituel qui procède à l'enfilage des bas.
Un à un, en prenant appui, chaque pied à son tour, sur la chaise.
Devant la fenêtre.
Il fait nuit maintenant. J'allume la petite lampe. D'abord (comme maman me l'a appris), on fait le poing, on l'insère dans le bas jusqu'à son extrémité. On ouvre la voie. Ensuite, on l'enroule sur lui-même. Il est recommandé de mettre des gants s'il s'agit d'une soie fine. Après, on installe le bas méticuleusement, avec toute la délicatesse qu'il faut pour que les petits doigts de pied s'installent à l'endroit du renfort et que le talon suive dans sa courbe naturelle pour se mettre en place posément. Enfin vient le pur plaisir dans toute son essence…
Il s'agit de remonter très précautionneusement le bas le long du mollet, jusqu'au genou. Il est permis (voire recommandé) d'effleurer savamment le joli renflement dudit mollet afin d'en vérifier l'attraction sensuelle. Cet instant divin révolu, il ne reste plus qu'à refermer l'écrin en élevant le bas jusqu'en haut de la cuisse pour, enfin, l'enchâsser dans le porte-jarretelles. Mission accomplie. Aucun bas n'a filé, j'y ai veillé.
Mais que le temps passe vite !
Encore un peu et je serai en retard.
Vite la culotte ! Vite le corsage ! Vite la jupe !
Un dernier regard au maquillage, à la coiffure, tout est parfait.
Pour plus de prudence, je vais fermer la fenêtre. N'importe qui pourrait escalader en mon absence.
Je constate en passant qu'on joue toujours "Les Enfants du Paradis" dans le petit cinéma d'en face.
Mon regard remonte le long de l'enseigne lumineuse. Jusqu'au joli balcon en face de notre studio. Dans l'ombre, un minuscule point rouge attire mon attention. Le bout incandescent d'une cigarette.
Tiens, je n'avais pas remarqué que nous avions un nouveau voisin.
Lui, par contre…

2 commentaires:

  1. Don Bruno de la Vega8 juin 2011 à 10:20

    Juste pour dire que j'avais adoré ce texte et sa chute (et donc ne pas le laisser sans commentaire..)

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  2. Merci beaucoup Don Bruno, je suis très touchée!

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