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lundi 28 septembre 2020

Concrètement, comment fait-on pour avorter ? (Un extrait de "C'est mon corps", Ed. L'iconoclaste, 2020)

 Aujourd'hui 28 septembre, c'est la journée mondiale de l'IVG.

La santé, c'est la santé des femmes. La santé des femmes, c'est la santé.

Et il ne peut y avoir ni soins ni santé sans décision éclairée (informée) et LIBRE.

L'IVG doit être accessible à toutes les femmes, en toute sécurité.

L'expérience que m'ont offerte les femmes, soignées et soignantes, dans un centre d'IVG entre 1983 et le début des années 2000 a fait de moi une meilleure soignante et un écrivant publié.

Je ne l'oublie jamais.

Marc Zaffran/Martin Winckler

Ci-dessous, quelques pages de "C'est mon corps" (L'Iconoclaste, 2020) consacrées à l'IVG. 




















jeudi 17 septembre 2020

Qui c'est ce mec cis-hétéro (pas tout à fait) blanc qui se permet de parler de santé des femmes ?

La question est parfaitement légitime. Beaucoup de lectrices et internautes qui m'entendront parler vont se la poser, et elle mérite une réponse. Cette réponse, je la donne au tout début de C'est mon corps (Ed. L'Iconoclaste), publié ce mois-ci. 

La présentation du livre (et son sommaire) sont ici

La réponse à la question posée ci-dessus est reproduite ci-dessous. 

Merci de votre attention. 

MW 








mardi 1 septembre 2020

Je hais les hommes - par Martin Winckler

En soutien inconditionnel à toutes celles et ceux qui les subissent


Je hais les hommes qui roulent des mécaniques 

Je hais les hommes qui parlent méchamment aux femmes avec qui ils couchent et qui, quand elles leur font justement la gueule, disent "Oh, mais ma petite chatte t'as pas compris que c'était une blague ?" 

Je hais les hommes qui disent à leurs enfants : "Pleure pas, tu fais chier" 

Je hais les hommes qui déclarent que les féministes veulent prendre le pouvoir pour leur couper les couilles... alors qu'eux-mêmes n'hésiteraient pas à violer s'ils étaient certains de ne pas être pris et, parfois, le font en étant assurés qu'ils n'auront jamais à en payer les conséquences 

Je hais les hommes qui prétendent qu'il existe un racisme anti-hommes. Ou anti-blancs. (Oui, ce sont tous des hommes blancs, comme par hasard.) 

Je hais les hommes qui aiment le pouvoir, car ceux-là aiment le pouvoir plus que tout, toutes et tous

Je hais les hommes qui frappent les autres en sachant que l'autre ne peut pas riposter  

Je hais les hommes qui se dressent sur la pointe des pieds pour avoir l'air plus grand que leurs voisins

Je hais les hommes qui racontent des blagues graveleuses 

Je hais les hommes qui disent "T'es qu'un pédé !" "T'es qu'une lopette !" "T'es qu'une fille !" ou "T'as pas de couilles !" - en riant avec mépris

Je hais les hommes qui disent : "Mon petit" 

Je hais les hommes qui vous toisent en disant "Qui êtes-vous", comme si l'on n'était rien ni personne. 

Je hais les hommes qui se mettent à fumer avant d'avoir demandé si ça gêne quelqu'un, et qui, quand on leur dit que ça gêne, fument quand même 

Je hais les hommes qui font de la vitesse sur l'autoroute pour montrer qu'ils ont la plus grosse, ou simplement parce qu'ils peuvent 

Je hais les hommes qui, parce qu'ils portent une blouse blanche, parlent et se comportent comme s'ils étaient l'élite de la société et connaissaient tout de la vie et de la mort 

Je hais les hommes qui n'écoutent pas 

Je hais les hommes qui s'écoutent parler et qui se regardent écrire

Je hais les hommes qui n'entendent que leur égo et sautent en l'air dès qu'on souffle dessus 

Je hais les hommes qui ne savent pas se taire, mais qui se la bouclent et se détournent quand il s'agit de prendre la défense d'une personne maltraitée ou insultée 

Je hais les hommes qui sourient avec condescendance 

Je hais les hommes qui, du haut de l'estrade d'une faculté de médecine, exprimaient leur mépris des personnes soignées devant les étudiantes parmi lesquelles je me trouvais ; et je hais les hommes qui, sur les mêmes bancs que moi, riaient et les applaudissaient à tout rompre

Je hais les hommes qui vous invitent au restaurant, vous tapent sur l'épaule en promettant monts et merveilles, s'écoutent lancer mille et un projet et oublient tout en montant dans leur taxi 

Je hais les hommes qui brutalisent les autres dès l'école primaire et qui continuent à brutaliser toute leur vie. Même quand ils sont devenus concierge, prof de maths ou médecin

Je hais les hommes qui disent : "T'as jamais baisé tes patientes, toi ? Tu sais que ça leur fait beaucoup de bien ?" 

Je hais les hommes qui disent : "J'ai beaucoup fait pour toi, tu me dois bien ça" avant de vous demander de faire un truc ignoble "pour leur rendre service" 

Je hais les hommes pour qui l'amitié est un échange de services - et donc, souvent, de mauvais procédés 

Je hais les hommes qui se penchent vers vous et disent, en aparté : "Celle-là, je l'ai baisée. Et elle en redemandait" et qui ne comprennent pas qu'on se lève en disant : "T'es qu'une saloperie." 

Je hais les hommes qui commettent des horreurs en disant "J'ai fait ça pour ma famille" 

Je hais les hommes qui ne veulent pas entendre à quel point ils sont complices des hommes qui maltraitent les femmes 

Je hais les hommes qui disent : "Cet argent, je l'ai bien mérité." 

Je hais les hommes qui disent : "Mais tu ne m'as pas compris !" ou pire : "Mais tu ne peux pas comprendre !" 

Je hais les hommes qui mecspliquent aux opprimées et aux révoltées quel ton (et quel niveau sonore) elles devraient adopter pour que l'expression de leur révolte soit "acceptable"

Je hais les hommes qui se comportent comme des gourous, se présentent comme des sauveurs et se plaignent d'être des victimes sur toutes les chaînes de télé et de radio qui les invitent  

Je hais les hommes qui produisent des émissions dans lesquelles ils invitent d'autres hommes pour se mettre en valeur en parlant des problèmes des femmes 

Je hais les hommes qui déclarent tout de go : "Vous me devez des excuses !" 

Je hais les hommes qui peignent des fresques pornographiques sur les murs des internats 

Je hais les hommes pour qui les "sauvages" et "l'ensauvagement", c'est toujours pour les pauvres et qui ne remettent jamais en question leur propre sauvagerie de riche 

Je hais les hommes qui disent "Taisez-vous." 

Je hais les hommes qui coupent la parole en disant "Vous n'y connaissez rien" 

Je hais les hommes qui préfèrent les attaques personnelles - ça leur évite d'avoir des arguments 

Je hais les hommes qui parlent de la hauteur de leur statut professionnel, social ou politique 

Je hais les hommes qui usent de leur fonction, si microscopique soit-elle, dans l'administration ou les services publics, pour martyriser celles et ceux qui doivent faire appel à eux 

Je hais les hommes qui ne répondent pas quand on leur dit bonjour 

Je hais les hommes qui abordent les femmes dans la rue 

Je hais les hommes qui, quand une femme dit "J'ai mal", répondent : "C'est dans ta tête." 

Je hais les hommes qui aiment les titres et les médailles 

Je hais les hommes qui disent : "Surtout, ne le dites pas à ma femme" et qui éclatent de rire 

Je hais les hommes qui, parce qu'ils bossent dans un ministère, pensent qu'ils ont le droit d'emmerder le monde 

Je hais les hommes qui disent "Les femmes-ci, les femmes-ça" 

Je hais les hommes qui disent "Nous, au moins" en parlant des hommes comme eux 

Je hais les hommes qui passent près d'un corps couché dans la rue sans même le regarder 

Je hais les hommes qui disent "Moi, je fais la vaisselle, elle n'a qu'à demander" 

Je hais les hommes qui pensent que la réalité se limite à leur champ de vision 

Je hais les hommes qui pensent qu'ils n'ont de conseil à demander à/à recevoir de personne 

Je hais les hommes qui ne lèvent pas le petit doigt quand une personne se fait insulter, bousculer ou maltraiter sous leurs yeux 

Je hais les hommes qui éructent leur haine en citant des philosophes, la Bible, Freud ou les romans d'auteurs racistes, antisémites, mysogynes ou homophobes (ou les quatre en même temps) 

Je hais les hommes qui sont toujours fiers et n'ont jamais honte d'être des hommes, pas même en entendant ou en voyant des hommes se comporter comme des ordures 

Je hais les hommes qui tournent le dos à un ami parce que cet ami ne suit pas la voie qu'ils auraient choisi pour lui 

Je hais les hommes qui ne savent rire que des autres et jamais avec eux ou elles  

Je hais les hommes qui donneraient tout pour faire partie d'un club d'hommes très fermé mais ne supportent pas l'idée que des femmes veuillent se réunir entre elles 

Je hais les hommes qui comptent leurs "conquêtes" 

Je hais les hommes qui affichent leurs privilèges comme s'ils allaient de soi  

Je hais les hommes qui parlent entre eux du corps des femmes quand elles passent 

Je hais les hommes qui pensent qu'ils ont tout compris et que les autres sont des imbéciles 

Je hais les hommes qui montent sur leur grands chevaux rien qu'en voyant le titre d'un livre 

Je hais les hommes qui voient des complots partout mais ne s'interrogent jamais sur leur perception du monde 

Je hais les hommes qui crachent à la gueule d'une femme ou d'un homme parce que tout le monde autour d'eux l'a déjà fait 

Je hais les hommes pour qui partager est "une connerie"  

Je hais les hommes qui pensent que le savoir, c'est le pouvoir 

Je hais les hommes pour qui la compassion est une faiblesse 

Je hais les hommes qui disent "mon sentiment" en émettant des jugements de valeur 

Je hais les hommes qui parlent de "valeurs" (actuelles ou non) au pluriel 

Je hais les hommes qui disent "Ma morale me dicte de..." 

Je hais les hommes qui parlent aux adolescentes en disant "Ma petite" et aux femmes adultes en disant "Ma cocotte" 

Je hais les hommes qui disent "Faut que t'en chie comme j'en ai chié" 

Je hais les hommes qui disent : "C'est pas un boulot de femme" 

Je hais les hommes qui disent : "T'es pas fait pour ce métier" 

Je hais les hommes qui déclarent sans rire savoir ce que quelqu'un d'autre a dans la tête 

Je hais les hommes qui disent : "Toi, j'te raterai pas" 

Je hais les hommes qui pensent qu'ils n'ont besoin de personne 

Je hais les hommes pour qui la douceur est de la mièvrerie et la gentillesse de l'hypocrisie 

Je hais les hommes qui détestent qu'on partage le savoir 

Je hais les hommes qui ont des armes chargées chez eux 

Je hais les hommes si imbus d'eux-mêmes qu'ils vont jusqu'à déclarer : "Je pourrais greffer des couilles, si je voulais" 

Je hais les hommes qui aiment la chasse et tirent sur tout ce qui bouge, au risque de tuer quelqu'un 

Je hais les hommes qui sortent en bande et insultent, sifflent, menacent ou frappent sur leur passage  

Je hais les hommes qui trouvent "tout naturel" d'utiliser les autres 

Je hais les hommes qui jouent au golf pendant que leur pays est à feu et à sang 

Je hais les hommes qui, pendant les journaux télévisés, déclarent : "Les Français n'ont pas bien compris ce que je cherche à faire..." 

Je hais les hommes qui pensent que si une femme ne dit rien, si elle dort, si elle ne se défend pas, ce n'est pas un viol 

Je hais les hommes qui trouvent "normal" qu'un autre homme leur donne accès libre au corps d'une femme ou d'un·e enfant

Je hais les hommes qui pensent et suggèrent -- et parfois disent -- "elle l'avait cherché" quand un homme a commis un féminicide ; ces hommes-là ne valent pas mieux que l'assassin ; ils pourraient le devenir facilement 

Je hais les hommes qui pensent que leur statut efface leurs ignominies 

Je hais les hommes... 

(A suivre) 

NB : Lisez les commentaires, ils sont pleins de "Je hais les hommes" supplémentaires écrits par les internautes. 

Marc Zaffran/Martin Winckler 


(Première publication le 1/09/2020. Texte complété et révisé le 14/09/2024)