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dimanche 30 octobre 2011

"Si j'avais un million" (Exercice n°20) et "Si c'était à refaire" (Exercice n°21)

"Si j'avais un million" (Exercice n°20)

Bon, ça, c'est la fiction par excellence : que ferait-on si... on avait les moyens de le faire ?

Contrainte : on ne choisit pas (sauf en rêve) la somme dont on disposerait. Alors je l'ai fixée, à 1 million. De la monnaie de votre choix.
Longueur : vous devez traiter le sujet en (non pas un million...) 3000 signes et espaces.
Remise : quand vous voulez.
Publication : à mesure que ça vient.

"Si c'était à refaire" (Exercice n°21)

Fiction aussi essentielle que la première. Tout le monde voudrait revivre un moment pour le modifier, dans un sens ou un autre. La difficulté consiste à choisir lequel. Et comment.

Contrainte : Ecrire à la troisième personne. Une courte nouvelle de SF dans laquelle un personnage "retourne" dans un moment choisi de son passé et change le déroulement des événements simplement en déplaçant un objet. Il ne peut rien faire d'autre. Il ne peut rien dire d'autre que ce qu'il a déjà dit à ce moment là. Il peut seulement déplacer un objet.
Longueur : 4500 signes
Remise : quand ça vous plaît
Publication : Dans l'ordre d'arrivée


"Bonne chance, Jim... "

vendredi 28 octobre 2011

Quand je serai plus vieux - par "Ma cocotte, et alors ?" (Exercice n°6, rattrapage)

Quand je serai plus vieux

Quand je serai plus vieux, je n'aurai plus de haine
Je ne verrai du monde que ses belles façons, les jupes des filles insouciantes sous lesquelles je n'ai jamais posé les yeux, les sourires timides que je n'ai pas su prendre, les mains tendues toujours en suspens quelque part et
J'oublierai ma part sombre et ne boirai que la lumière et
Quand je serai plus vieux, je ne boirai peut-être plus, d'ailleurs, je cesserai de m'oublier dans les reflets dorés de ce whisky de trop, je vous regarderai vous que j'ai offensé, je vous écouterez sans plus jamais hurler et
Quand je serai plus vieux, j'apprendrai à me taire, je gommerai sans bruit mes insultes et mes grossièretés pour n'être plus enfin que mon propre anathème et
Quand je serai plus vieux, fatigué, malade et repenti, je revivrai en rêve toutes ces putains de vies que je ne vivrai jamais, je n'aurais jamais été cet enfant hurlant de douleur et de rage, réduit au pire des esclavages, je n'aurais jamais vécu cette sale guerre, ces saccages, je ne l'aurais jamais aimée, elle, et elle ne m'aurait jamais possédé comme un imbécile que je suis et
Quand je serai plus vieux, je n'aurai même plus la force de n'être qu'un lion en cage, un vieux lion radotant, pelé, répugnant et
Quand je serai plus vieux, je te regarderai, toi et j'espèrerai qu'il ne sera jamais trop tard pour te dire, avant mon dernier regard, ce mot que je n'ai jamais dit car
Quand je serai plus vieux, enfin je t'aimerai.

vendredi 21 octobre 2011

"Something happened" par "Ma cocotte, et alors ?" - exercice n°9


Dans cette voiture, tout n'est que silence oppressant. Pourtant, le moteur tourne. Le vent siffle. Les essuie-glace semblent ponctuer en rythme la chanson que les enfants martèlent. Le silence n'étouffe que ses propres pensées. S'il faut croire qu'à l'instant de mourir, chacun voit défiler son passé alors elle doit être en train de mourir, là, dans cette voiture, son mari à ses côté, ses enfants à l'arrière. Tout virevolte dans sa tête, les années de bonheur comme celles d'ennui. Sauf que l'ennui la suffoque.
« Vous n'en avez pas marre de chanter toujours la même chanson ? Et si on mettait la radio ? - Oh ouiiii, papa. La radio ! La-ra-di-o ! »
Il cherche une fréquence. Il en trouve une et une chanson explose dans l'habitacle et dans son cœur.
« J'adore vivre depuis ce matin Au creux de cette nuit vaincue J'ai vu j'ai su que c'était foutu J'adore vivre depuis ce matin Depuis que je sais qui je suis Que je te quitte que c'est fini »
Partir. Tout abandonner. Vivre enfin. Être ce qu'elle est. Tout ce temps à réfléchir. Adorer vivre, oui. Ce lever chaque matin pour vivre une journée choisie, voulue, désirée. Ne plus subir. Ne plus voir dans le miroir ses sourires effacés, perdus.
« Je m'en vais Je m'en vais Je m'en vais »
Partir. Accepter de ne plus être ceux qu'ils étaient, avant, il y a longtemps, quand ils s'aimaient encore. Pouvoir enfin rire avec les enfants, librement, sans amertume.
« Je ne suis pas encore mort On ne s'est pas entretués Alors je selle ma monture Je repars à l'aventure »
Tout ne peut pas rester enseveli dans cette histoire. Tant de choses encore à vivre. Et retrouver l'espoir. Des projets. Le désir. Il n'est pas trop tard. On ne s'est pas entretués, non. Juste le silence, ce silence qui nous tue plus sûrement que les cris.
« Non n'insistons plus non Ça ne sert à rien Cette sale histoire nous a fait les poches Je te dis au revoir c'était bien. »
C'est vrai que ça devient moche, entre nous. Il suffirait peut-être de le dire. Mais pas là. Mais quand ? Jamais le bon moment. Et comment faire des reproches ? Qu'ai-je fait ces dernières années pour améliorer les choses. Rien. Mes poches sont vides de désir. Plus envie. Ni de lui, ni de rien. Plus qu'une tristesse étouffante. Rester. Restée pour les enfants. À quoi bon ? A quand remonte le dernier fou rire familial ? À jamais. Trop de frustrations, trop de rancœurs hurlent entre nous.
« Je m'en vais Je m'en vais Je m'en vais »
Oui, je m'en vais. Et je souris au bas-côté de la route. J'en pleurerais, de ce sourire, si je pouvais. Mais je sais si bien retenir mes larmes, ravaler mes peines. Faire face. Je regarde les arbres disparaître dans le lointain, la course des nuages, les rigoles de pluie parcourir la vitre. Je poursuis chaque goutte solitaire jusqu'à ce qu'elle ait rejoint une plus grosse rivière.
Ce soir, je m'en vais.



mardi 18 octobre 2011

Le livre de mon enfance - par Fred (Ex. n°18)


Dans la marge, par Fred

Quand j'étais môme, j'ai lu et relu les "Albums de la Jeunesse Joyeuse" (sic).
Quand j'étais môme, j'ai lu et relu "Bibi Fricotin, roi du scooter". Bibi et son pote tout noir Razibus Zouzou. Une bande dessinée qui racontait une course autour du monde en scooter, quel bonheur ! Dans mon souvenir, cet album se mélange avec "Bibi Fricotin en Inde". Il y avait un fakir sur la couverture, j'étais drôlement impressionné.



 J'ai fait maintes fois avec eux le tour du monde, passant d'une case à l'autre, d'un paysage à l'autre, d'un étranger à l'autre. La route. Faire la route, traverser les lieux. Ne pas prendre l'avion. Je ne sais plus si je me disais qu'un jour je traverserais le monde, je ferais la route, mais ce fantasme s'est inscrit en moi. Bibi Fricotin, mon premier Kerouac ! La route. La route qui vous prend. Je suis parti retrouver ces sensations, autobus et auto-stop, gares routières et trains bondés, sac à dos et marche à pied, en Afrique de l'ouest, en Patagonie, au Canada, et c'est peut-être bien grâce à Bibi Fricotin, le roi du scooter !






Quand j'étais môme, j'ai lu et relu les Pieds Nickelés. Les Pieds Nickelés, c'est… comment dire ? C'est le pied ! Et c'est nickel ! Croquignol, Ribouldingue et Filochard, trois canailles sympathiques toujours en quête d'une nouvelle combine pour ne surtout pas gagner leur vie honnêtement. Ils déploient des trésors d'ingéniosité pour monter des coups fumants, et souvent fumeux. Ils font des efforts incroyables pour n'avoir pas à faire d'efforts ! Un vrai guide pratique pour libertaire en herbe ! Un genre de manuel des Castors Juniors pour graine d'ananar. A côté de mes jolis cahiers de bon élève, tout propres sous leur protège-cahier, existait un autre monde… Une marge… Chaque début d'album les voyait fauchés - plus de flouze les aminches, plus d'artiche les poteaux ! - mais, après avoir inventé toutes sortes d'escroqueries de plus ou moins grande ampleur, après avoir filé de justesse sous le nez de la maison Poulaga, après s'en être mis plein les fouilles - cette fois, c'est la fortune, les frangins ! - ils finissaient évidemment fauchés comme devant ! L'enjeu était donc ailleurs : rester dans la marge, mettre tout en œuvre pour résister à… quoi ? La réussite, la norme, le conforme. L'insertion, dirait-on aujourd'hui. Renouveler sans cesse l'aventure, l'inconnu, le précaire, le bancale, le bricolé, le vivant. Jamais se poser, jamais s'installer, quitte à avoir le ventre creux, toujours commencer, recommencer. Jamais de vrai point final. Vivre de points d'interrogation, de points d'exclamation. De points de suspension…

jeudi 13 octobre 2011

Les films de ma vie - par Clémentine (ex. n°19)


La télé m'a bouffé mon enfance parce que j'ai eu un rapport étrange avec elle. Nous n'en avions pas quand j'étais petite. Le problème quand on grandit sans la télé, c'est que son pouvoir sur vous est brut, incommensurable. Vous ne la dominez pas, elle vous maîtrise largement et vous pourrit l'être. Ou bien, ma sensibilité aux images qui bougent était peut être plus grande que la moyenne. Aujourd'hui encore, je ne maîtrise pas ce rapport avec le petit écran. Une télé dans mon champs de vision, je scotch. Fort.
J'allais rendre visite à ma grand mère juste pour le plaisir de regarder sa télé. Je connaissais l'abjection de mon acte, mais Mamie était quand même contente de me voir. Et puis je faisais un canard dans son café avec un sucre.

Voici venir le premier film de ma vie. Grace. Je ne sais pas si c'est le titre exact. C'était le prénom de l'héroïne. Grace. A mes oreilles, Grasse. Déjà, comment pouvait on s'appeler Grasse? Grace était grosse. Donc le personnage principal, une fille obèse est en quête de l'amour. Elle le rencontre à la patinoire. C'est un prince charmant. Ils vivent une relation, et finalement, elle le quitte.
C'était le premier vrai film que je voyais. En fait, un feuilleton pour ménagère, mais ça, je ne le savais pas. Je devais avoir 6 ans. Nous étions chez des amis de mes parents et ils nous avaient collé devant la télé. Mon bonheur était immense.
Je n'ai jamais vu la fin de ce film. Ma mère a brutalement interrompu mon rêve à cinq minutes de la fin. Il fallait rentrer. J'ai vertement protesté, j'ai peut être pleuré. J'ai souvent repensé à ce film que je n'avais jamais fini. Cette scène est resté gravé en moi. La grosse qui prend le train, le prince charmant qui lui court après. Ma mère qui coupe.
Ma vie de cinéphile a débutée avec un navet, et s'est construite sur un traumatisme.

De nombreuses années plus tard, je suis retombée sur ce film (M6 - mardi - 15h30). J'ai vu non pas l'histoire de Grace, mais le feuilleton pour ménagère. C'était bien la même histoire, les même noms, les même personnages, mais tout était différent. Non, une chose uniquement avait changé. Mon regard.
J'ai regardé jusqu'au bout, pour constater avec horreur que Maman avait coupé le film non pas à cinq minutes de la fin, mais à dix secondes. Le prince rattrape sa grosse, ils s'embrassent sur le quai. C'était tout.

J'ai donc grandi sans télé, et assez rapidement je me suis sentie encore plus bizarre que ce que je ne me sentais avant. Pas exclue, non. Exclue, je l'avais toujours été dès que j'avais franchi l'immense porte de l'école St Michel. 
Les enfants parlaient du film qu'ils avaient vu la veille. Qu'est ce que je n'aurais pas donné pour moi aussi voir ce film d'horreur, où du sang coulait du robinet, où des scènes se déroulaient dans les égouts, où un clown mangeait les enfants...
Quelques années plus tard, ma soeur s'est procuré le film. Une VHS enregistrée. Ce fut donc le deuxième film de ma vie. Le clown. Une adaptation d'un livre de Stephen King. Mon premier film d'horreur. Encore un feuilleton niais, mais les sensations étaient là. Ma soeur n'aurait jamais, au grand jamais, partagé une telle trouvaille avec moi. Mais quand le trésor vous épouvante, la petite Clémentine peut être bien utile pour vous rassurer. Et vous couvrir. Car nous regardions la télé en véritables pirates. C'était interdit. Elle était d'ailleurs installée dans le grenier. (Oui j'ai regardé mon premier film d'horreur dans un grenier. C'était normal chez moi). De là où nous étions, et avec le son du poste, nous n'entendions jamais Maman rentrer. Et l'échelle faisait un bruit épouvantable. Bref, on se faisait toujours attraper, gronder et punir de télé.
Nous avons donc regardé ce film toute les deux. J'ai vu avec horreur et plaisir le sang couler du robinet, les enfants fuir dans les égouts, le clown manger des petits bras avec ses grandes dents.
Cinq minutes avant la fin, nous avons entendu Maman rentrer. Nous ne nous sommes pas fait punir mais je n'ai jamais vu la fin. Le cycle maudit se répétait inexorablement
Quelques années plus tard, je suis retombée sur ce film. C'était de la merde.

J'ai eu une enfance de princesse. A 9 ans je me revois devant ma classe, expliquant que mon poney allait faire les championnats de France de saut d'obstacle. Bref, j'étais une fan de canassons. Tous les samedis après midi, j'allais au poney club sur ma petite monture, pour la leçon. 
La télé a mangé ma passion. Salement, comme on mange un Mac Do, et vite fait. Elle l'a roté -car la télé est grossière, elle n'a pas de manière, elle a eu mal au ventre, la digéré et je n'en ai jamais plus entendu parler. Je passais mes samedis après midi affalée sur le canapé du grenier, devant des émissions qui n'étaient pas pour moi, attendant avec impatience les pages de pub. Mon cerveau était d'une disponibilité optimale. Quand il y avait du soleil, la lumière me gênait. Mon adolescence fut un véritable gâchis.

Aujourd'hui, je n'ai pas la télé. Je n'en aurais plus jamais. Je ne fais plus de cheval. Ca fait mal aux fesses.

Plus tard, je suis devenue cinéphile. Je pense que j'avais des prédispositions. 
Dès que je suis rentrée au collège, j'ai fréquenté énormément le cinéma. Nous inaugurions le multiplex de douze salles géantes dans notre petite ville. Que du bonheur. C'était la compétition avec Contine, ma copine. C'était à celle qui allait voir le plus de films. Nous gardions tous les tickets, comme preuve. Contine les a toujours d'ailleurs. Mes parents étaient atterrés. Surtout Papa qui n'y comprenait rien. Il n'y comprends toujours rien. Sa dernière séance, c'était les Visiteurs.
Contine a choisi de faire médecine, moi j'ai choisi de faire une école de cinéma. C'était un mauvais choix, parce qu'aujourd'hui, je n'ai pas de travail. Mais Contine va être médecin et elle n'est pas heureuse, alors je n'ai pas de regret. L'école de cinéma m'a permis, entre autres, de regarder un max de films sans culpabiliser. 

Et voici le troisième film de ma vie. Antonio de las Mortes. Le symbole de ma grande époque. Je bouffais du DVD à longueur de journée, dans mon studio à Paris. Je rêvais de posséder tous les films que Le Monde édite dans des coffrets, vendus chez les marchands de journaux. Des vrais trucs d'intellos. 
Une après-midi donc, je prends mon coffret, je choisi Antonio de las Mortes. L'affiche n'est pas mauvaise et rappelle les westerns de Clint. Sur la jaquette, le commentaire était très excitant: "Antonio de las Mortes n'est autre que le cinéaste lui-même cherchant à détruire les conventions ésthétiques et morales produites par le monde qu'il combat." Je me prépare des tomates à la mozzarella, je baisse les stores, je m'installe confortablement sur mon canapé, et je lance la séance. Le pitch? Un guerrieros brésilien des années 50, monté sur un cheval blanc. Il fait quoi? Je ne sais plus, mais il a une copine qui est habillé en blanc et qui a une seule réplique, très spirituelle, que je n'ai pas comprise. Le méchant a une vraie  tête de méchant, et une écharpe fine et rose. Antonio est théâtral, il parle en vers. De longs monologues. Une chute sans queue ni tête après deux heures d'images. Le réalisateur? Un certain Glauber Rocha, assurément défoncé aux champignons magiques du Mexique. Antonio de las Mortes est un OVNI, une ineptie, une pustule sur le corps déjà imparfait de la Vénus du 7e art.
Mais j'étais ravie. Ravie de faire partie de la catégorie réduite de cérébraux qui ont vu Antonio de la Mortes. Vous l'avez vu? Vous avez aimé? Vous avez compris? Super. Ne m'envoyez pas de message privé merci.
Je n'ai malheureusement jamais eu l'occasion de sortir dans une conversation que j'avais vu ce chef d'oeuvre du cinéma indé brésilien d'avant garde qu'est Antonio de las Mortes. Ce film fut donc une perte de temps et marque l'extrême profondeur de ma période intellectuelle.

lundi 10 octobre 2011

Les livres de mon enfance - par Lyjazz (Ex. n°18)



Les enfants du capitaine Grant, Jules Verne
Pour l’aventure, l’histoire, dont je ne me souviens plus. Sauf que les deux enfants se retrouvent dans une île. J’ai juste le souvenir de recherches géographiques, de questionnements, de cartes et d’ailleurs.  
Pour l’objet : le livre me suit toujours.
Pour les moments à me perdre dedans, parce que j’avais du temps, parce que je n’avais pas d’autres livres
Surtout parce qu’il me rappelle que le fait d’habiter une toute petite ville sans bibliothèque (quand le collège était fermé), quand on n’a pas d’argent et tout lu dans la maison, c’est vraiment une situation que je ne souhaite à aucun enfant.
Je tannais ma mère pour aller faire le marché avec elle et acheter UN livre chez le bouquiniste, mais je l’avais fini en 2 jours. Et j’ai donc passé de longues heures à me demander quoi lire, et à relire Les enfants du capitaine Grant. Parce qu’il est gros, épais, qu’il y a des heures de lecture à prendre, dans mon fauteuil, sous les arbres, dans les arbres, allongée dans l’herbe, ou contre le mur au soleil, une poignée de cerises près de la main…
Il est donc pour moi synonyme de cet ennui profond, de ce manque de culture et d’ouverture du village.
Depuis mes 20 ans j’habite une grande ville, essentiellement pour avoir accès à des bibliothèques, librairies et cinémas. Et ne plus me trouver dans cette situation d’être obligée de relire un livre alors que je meurs d’envie de nouveauté.
C’est donc un livre fondateur de ma vie, de mon désir de ne pas être coincée de nouveau dans cette situation.
Et en partie des études que j’ai faites : je suis partie à la ville pour l’Université d’Histoire Géographie.
Je dis en partie parce que j’ai toujours eu connaissance de l’Histoire familiale liée à l’immigration, et donc aux cartes et à la géographie.  


Nadja, d’André Breton
Un livre qui m’a fait une telle impression qu’à peine terminé j’ai relu la 4ème de couverture, à 2h du matin. J’ai posé le livre sur ma table de nuit, sous la lampe de chevet au pied sculpté venant de Madagascar, et le lendemain en me réveillant, sans même me lever, je l’ai repris au début. Incrédule. Avide de retrouver les mêmes sensations. J’avais 15 ou 16ans.
Longtemps, dans les moments de vacuité, pour me retrouver, pour me raccrocher à quelque chose qui me semblait moi, j’ai récité des passages de ce livre. J’en connais encore des lignes par cœur, qui sont comme une antienne, un mantra, un antidote, un calmant. Il est toujours présent à mon esprit.  


L’œuvre au noir, de Marguerite Yourcenar
Je l’avais emporté pour un camp d’ado itinérant en Italie. J’avais 17 ans. Je n’étais plus enfant. J’ai rencontré une fille, une parisienne, nourrie à la culture et aux musées alors que je l’étais aux bals de village et de lycée, à la fête et à la chasse aux champignons. Elle venait de le lire et cela nous a rapprochées. Nos échanges amicaux et épistolaires ont duré plus de 20 ans alors que nous ne sommes revues que 2 fois. Elle toujours sur le mode littéraire classique malgré son travail de secrétariat de direction, moi toujours sur le mode de la littérature tripale. Quant au livre, je l’ai relu une fois par an pendant plusieurs années. Toujours émerveillée de ce style et de cette érudition. J’ai ensuite lu tout Marguerite Yourcenar, et je l’ai acheté en Pléiade. Comme un bijou ou un talisman. Un vestige de ce classicisme littéraire et matériel, vu de notre ère de l’électronique.
Il m’en reste le désir d’aller voir là-bas ce qui se passe, de ne pas mourir sans avoir fait le tour de ma prison. Je sais que je cherche à comprendre, à m’améliorer, sur les pas de Zénon.
J’aime toujours écrire des lettres à mes amis, même si elles sont plutôt électroniques.
Et enfin, je l’ai conseillé ce week end à un homme qui ne lit que des classiques et ne connait pas Yourcenar.

Lyjazz

vendredi 7 octobre 2011

Les films de ma vie - par Julie (Ex. n°19)


Comme pour la plupart de mes camarades du blog, sélectionner trois films n’est pas une mince affaire. En y réfléchissant, il me paraît judicieux et moins frustrant d’arrêter mon choix sur trois films qui ont été des portes sur tout un pan du cinéma pour moi, qui ont été une introduction à des genres, des époques, des acteurs. Essayer de cerner en quoi ils ont été des points de repère d’où partir vers autre chose, d’autant plus que le goût du cinéma ne m’est pas venu tout de suite.
 
Moby Dick de John Huston (1956). J’étais élève dans le collège d’un bourg et de temps en temps nos professeurs organisaient une expédition au cinéma de la petite ville voisine. Je nous revois sur la place centrale, pleins d’excitation de voir la routine scolaire rompue. Ce jour-là, on nous avait emmenés voir Moby Dick. Je ne m’intéressais pas encore au cinéma, je ne connaissais ni John Huston, ni Gregory Peck, ni Orson Welles, ni Herman Melville. J’étais très émotive et la moindre goutte de sang à l’écran, la moindre trace de tension psychologique me mettaient au bord du malaise. Autant dire que la folie furieuse du capitaine Achab pourchassant Moby Dick à travers l’océan jusqu’à y laisser sa vie, et les flots de la mer devenus rouges autour du grand corps blanc du monstre bardé de harpons, m’avaient grandement impressionnée. D’ailleurs, en recherchant des images du film, je suis très étonnée de les voir en noir et blanc. Je me souviens vraiment de vagues rouges à perte de vue, sang de baleine et sang d’homme. Grâce à Moby Dick j’ai découvert que certains films sont des épopées, que la gravité d’un acteur peut faire passer beaucoup plus d’émotions et de complexité qu’un jeu démonstratif et que la folie d’un personnage a quelque chose de magnétique au cinéma. Il m’a ramenée à mes souvenirs télévisuels d’enfance (Les Mystères de l’Ouest, peut-être, en tout cas une série « western » avec des cow-boys et des Indiens) et à mon goût des histoires se déroulant dans les espaces démesurés de l’Amérique sauvage (il m’a aussi permis d’imaginer un peu mieux la vie de mes ancêtres côté paternel, marins et pêcheurs, et le rapport qu’on a avec la mer dans ces métiers). Grâce à lui j’ai apprécié ensuite des films aussi divers que Simon du désert de Bunuel, les films des frères Coen, notamment True Grit, Citizen Kane d’Orson Welles et The African Queen de… John Huston.
 
Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick (1999). Ce doit être le film que j’ai le plus revu. Chaque image est un tableau à la composition et aux couleurs magnifiques, le jeu de Tom Cruise et Nicole Kidman est parfait, l’atmosphère unique, pleine d’érotisme et d’inquiétude mêlés, au point que parfois on ne sait plus les distinguer. Avec Eyes Wide Shut, ce que j’ai compris, c’est qu’un cinéaste doué pouvait montrer la moindre nuance de sentiment et d’humeur des personnages qu’il suit. Tout le film est fondé sur la vie intérieure du couple d’Alice et Bill, et il montre les failles qui s’y sont creusées et surtout les visions du désir opposées qui s’y développent. Là où Alice ne voit probablement qu’un avertissement poussé en forme de fantasme, Bill, lui, voit le point de départ d’une jalousie obsessionnelle qui le mènera bien plus loin que sa femme n’a osé aller. Tout en étant très américain (le jeune couple bourgeois à la réussite insolente dans son immense appartement, la bonne société new yorkaise), le film est une transposition extrêmement fidèle d’une nouvelle d’Arthur Schnitzler – j’ai été épatée de voir à quel point Kubrick réussissait à la retranscrire dans une autre culture à une autre époque sans rien en perdre ni même la transformer en profondeur. Bien sûr, Schnitzler ne décrit pas la soirée très spéciale qui a lieu dans la grande demeure hors de la ville, mais Kubrick n’a fait que déployer ce qui était suggéré dans la nouvelle, en tout cas si mon souvenir est exact. Le rapport de ce film à l’érotisme est très particulier, on passe sans cesse d’une suggestion sensuelle à l’effroi devant la noirceur de ce qui se tapit derrière. Chaque fois, je suis envahie par ce mélange même si je sais ce que je vais voir, c’est un véritable envoûtement. Je n’ai jamais l’impression de voir le même film parce qu’il va puiser dans nos émotions profondes et qu’elles changent toujours. J’ai recherché dans d’autres œuvres cette alchimie entre mystère et intimité, désir et inquiétude, et j’en ai trouvé certains aspects dans quelques-unes, mais jamais avec autant de force déstabilisante, sauf dans Dracula de Coppola et chez David Lynch (je ne pense pas que j’aurais autant aimé Twin Peaks et Mulholland Drive sans Eyes Wide Shut). Certains films parviennent à recréer l’univers intérieur d’un personnage (je pense à I’m Not There de Todd Haynes, centré sur les légendes qui planent autour de Bob Dylan, ou à Secret Window de David Koepp, avec Johnny Depp), et d’autres auteurs rendent tangible chacun à leur manière la sensualité de la vie, la prépondérance des émotions, leur fragilité et leur impact sur tout le reste (Denys Arcand, qui rapproche lui aussi la sexualité de la mort, Sam Mendes, Pascale Ferran dans L’Amant de Lady Chatterley, Bernardo Bertolucci dans Beauté Volée, Sofia Coppola dans Lost in Translation, pour lequel je partage votre enthousiasme, Sophie). Une piste inépuisable à explorer sur écran et sur papier…
 
Soudain l’été dernier de Joseph L. Mankiewicz (1959). J’ai regardé ce film parce que Katharine Hepburn y tenait un des rôles principaux. Je venais de la découvrir dans une comédie de Cukor et je voulais voir ce qu’elle dégageait dans une histoire plus sombre. Je n’ai pas été déçue ! De ce film-là aussi émane une ambiance vénéneuse et pleine d’épouvante qui n’appartient qu’à lui, on est tenté de voir les plantes carnivores de Violet Venable (Katharine Hepburn) comme une sorte de métaphore parfaite du film. Dans la scène où elles font leur apparition, elles créent par leur nombre et leur luxuriance une sensation de malaise profond ; et bientôt, le personnage de Hepburn les montre au médecin médusé (Montgomery Clift), tout en décrivant la mort de son fils et son projet pour le moins discutable en ce qui concerne sa nièce (interprétée par Liz Taylor), révélant l’ampleur de sa folie. J’ai rarement vu personnage aussi glaçant, surtout quand il est simplement assis dans un fauteuil, en grande tenue, à parler. Montgomery Clift et Liz Taylor savent lui donner le change et on suit leur histoire avec horreur du début à la fin sans pouvoir se détacher, d’autant plus que l’univers de la psychiatrie de l’époque est effrayant en lui-même. J’ai regardé d’autres films de Mankiewicz depuis et je trouve que la façon dont il les construit donne souvent l’impression de voir un véritable roman en images, probablement parce qu’il sait doser épaisseur psychologique et progression de l’intrigue ; ce film-là, par exemple, aurait pu être un livre de Patricia Highsmith. Soudain l’été dernier a signé le début de ma passion pour Katharine Hepburn et des actrices qui, sans lui ressembler, s’extraient elles aussi de l’image de la belle star hollywoodienne (Kate Winslet, Cate Blanchett, Tilda Swinton, Meryl Streep) pour donner à la fois chair et charisme à leurs personnages. Il m’a aussi donné le goût des films noirs et à suspense. Me viennent à l’esprit La nuit de l’iguane (encore et toujours Huston !), The Ghostwriter de Polanski, The Grifters de Stephen Frears et bien sûr Alfred Hitchcock, Claude Chabrol. Je ne serais pas allée vers eux sans passer par Mankiewicz.
 
Epopée, sensualité, tension psychologique : le jour où je trouverai un film qui tisse ces trois fils-là ensemble dans un équilibre parfait je serai la plus heureuse des cinéphiles !
(Et d’ailleurs, si vous avez des suggestions, n’hésitez pas !)


Julie

mercredi 5 octobre 2011

Les films de ma vie - par Younès (ex. n°19)


« Que du cinéma, quelques noms, quelques figures soient remarqués dans le temps », il prit un crayon et contrairement à ses habitudes souligna d’un trait maladroit la citation. Cinéma d’Alain Badiou devint son livre de voyage durant le trajet sur la ligne qui coupait La Seine à deux reprises et défigurait ainsi Paris en un smiley désabusé. Il y est aussi question de l’Amour dans le livre, ce qu’il a cru comprendre d’entre les lignes de philo et de quelques passages qui le laissaient songeur sur Identificazione di una donna d’Antonioni. De ses trois amours malheureuses restaient trois films.

Elle intervint sur Citizen Kane et l’éblouit quand elle dit :
-       Vous voyez que dans cette chambre obscure où des inconnus regardent News on the march, et tous ces journaux qui défilent à l’écran… Et finalement vous avez ce type qui sort la Rosebud. Orson Welles dit magistralement, ce n’est pas le propos du cinéma que cet étalage des news. Le propos du cinéma, c’est cet imaginaire pur de l’enfance.
Brillante comme elle était, le cinéma l’attendait avec impatience. Son histoire à lui se résumait au pain. Le pain a toujours été cher.

A la sortie du cinéma, elle lui fit part de son étonnement. A Serious man des frères Coen l’avait tellement secoué par sa pertinence, et il n’arrêtait pas de parler de ce plan où Larry Gopnik arrivait à la fin de la démonstration du principe de l’incertitude quantique. La caméra s’éloignait et découvrait un homme, un savant, petit devant ce tableau immense de l’amphi plein de formules qui cherchaient à figer l’incertitude. Juive, elle n’en revenait pas d’entendre un musulman interpellé par Hachem et ce principe vieux comme le monde. Quête éternelle pour lui, pour elle, pour tout le monde qu’il disait. Il voulait l’embrasser pour la première fois et passer la nuit à reproduire ses formules sur la peau délicate de son beau corps nu dont il ignorait tout, qui le rassurerait et lui prouverait que l’amour, au moins, était une certitude. L’ouverture du film s’y prêtait déjà avec cet infime point lumineux qui introduisait les Jefferson Airplanes et s’avérait être l’écouteur branché à l’oreille du fils de Larry. Il devint tout d‘un coup sérieux. Un homme sérieux. Tout n’est pas possible sur cette terre.

Ils étaient de ces rêveurs du bus qui faisaient durer leurs songes du matin jusqu’à l’arrivée à leur boulot. Elle s’appelait Nastassia, comme l’actrice de La Féline selon elle ou comme le personnage de Dostoïevski dans L’Idiot selon lui. Elle était vexée, l’évitait et il avait compris qu’il ne devait pas chercher une femme ni physiquement ni virtuellement. Il n’aurait pas dû. Dieu était-il dans The Tree of Life ou pas ? Dès le début, la caméra flottait incertaine sur le chemin à prendre. En off, la mère disait The only way to be happy is to love. Unless you love, your life will flash by. Un film mystique, un homme seul. Sa mémoire vagabonda un peu et trouva un petit air connu d’Ennio Morricone qui siffla lentement dans sa tête, You see in this world there's two kinds of people, my friend. Those with loaded guns, and those who dig. You dig. Le genre de répliques qui ne prennent jamais une ride, il savait à quelle catégorie il appartenait. Il écrivit à Nastassia qu’il ne prendrait plus jamais ce trajet de bus.

Au premier bras de la Seine, il laissait partir son âme sur les flots et plongeait dans sa lecture. Il la récupérait au deuxième bras et ne lui posait pas de questions. Il avait remarqué que les deux bras ne se ressemblaient guère. Il se promit d’être fidèle à ces deux rendez-vous.

dimanche 2 octobre 2011

Le livre de mon enfance - par Danalyia (Ex. n°18)


… Tous les jours se ressemblent, sauf peut-être le dimanche, il  y a moins de monde, comme toujours, moins de bruit partout. Jamais aimé le dimanche, jour gris de mon enfance, magasins fermés, pas de passage dans la rue, rien à faire, juste tuer le temps, attendre que revienne le lundi. À l’école, j’étais très sage, le préféré de la maîtresse. Quelquefois, un minuscule cadeau ou un dessin pour elle et alors son sourire, sa main sur ma joue, son regard de douceur... Mieux que Maman, criant toujours, pleurant souvent, pas de sa faute, pauvre petite Maman quand Papa l’attrapait par le bras, la secouait, la giflait « tu vas m’obéir, oui, t’as compris maintenant, et ne recommence pas, sinon je te casse la tête ! » Après, Maman assise par terre et moi essayant de la consoler mais elle me repousse, « va-t-en, laisse-moi, j’ai pas besoin de toi »… Jamais à la maison le dimanche, Papa, et alors pas de bruit, maman au lit jusque dans l’après-midi, elle dort, ne pas la déranger et moi seul, marchant de la cuisine à la salle à manger à ma chambre, « Je m’ennuie, je m’ennuie, je m’ennuie ». Dimanche, jour le plus triste à cause de ça, du silence, personne pour me parler… Un jour, la maîtresse a demandé : « Racontez votre dimanche » et les autres : « mes parents m’ont emmené au zoo, voir les singes et les otaries » ou « j’ai joué toute la journée avec mes cousins, aux cow-boys et aux indiens » ou « mon père m’a emmené au cinéma, voir Davy Crockett, c’était bien »… tandis que moi : « le dimanche, on fait jamais rien, je m’ennuie à la maison parce que Maman dort et Papa n’est pas là »… La maîtresse m’a gardé après la classe : « C’est vrai, ce que tu as écrit dans ta rédaction ? » Oui, maîtresse, c’est toujours comme ça… J’ai vu ses yeux qui brillaient, elle a eu l’air un peu triste : « Demain, je t’apporterai un livre et comme ça tu ne t’ennuieras plus » et le lendemain, elle m’a prêté Le petit prince 

« Tu peux le garder aussi longtemps que tu veux et après, je t’en prêterai un autre ; tu verras, il y a de très beaux dessins, tu me diras lequel tu préfères, d’accord ? » Difficile d’en préférer un. J’ai réfléchi : pas le renard, en tout cas, il a les pattes trop courtes et les oreilles trop longues. La rose sous son globe, alors, avec ses épines « dérisoires », c’est là que j’ai appris ce mot. Ou plutôt les baobabs, parce qu’on voit les racines. Moi, mes arbres, ils étaient quand même bien sages, pas question qu’ils envahissent tout… Le premier que j’aie dessiné, c’était pour la maîtresse, pour la remercier du livre. Elle a dit : « C’est très beau, tu sais, tu dessines comme un grand » et elle avait l’air étonné, presque inquiet. « Je garde celui-là pour moi, mais tu en feras d’autres, pour accrocher dans la classe, tu veux bien ? » Elle m’a donné du papier blanc et des crayons de couleur. Je n’arrêtais plus de dessiner, des arbres, rien que des arbres avec les racines au-dessus de la terre, mais jamais personne à côté et jamais de feuilles non plus, solitude et silence… Mon père disait : « Ils sont sinistres comme la mort, tes dessins », mais ça m’était bien égal, parce que tout était pour ma maîtresse que j’aimais, tandis que lui, je l’aimais pas… La maîtresse nous a demandé d’apprendre par cœur le poème ou le texte qu’on préférait. J’ai choisi la conversation du petit prince et du renard : « Si tu veux un ami, apprivoise-moi » et puis « Il faut des rites » pour savoir à quelle heure « s’habiller le cœur ». Sur l’estrade, j’ai récité en me balançant, comme une mélodie qui monte et qui descend. « C’est très bien », elle a dit, tu peux te rasseoir, et sa voix était comme une caresse qui me faisait chaud dedans. Elle s’appelait Mademoiselle Gauthier et c’était ma première maîtresse, à l’école communale. Sûrement morte depuis longtemps… Elle a emporté toute sa douceur ; non, elle m’en a laissé un peu, je la sens quand je me rappelle et ça  fait du bien, comme quand elle me parlait… Après elle, plus personne à qui offrir des dessins, alors j’ai arrêté… Un jour, elle m’a dit : « Tu peux garder Le petit prince, je te le donne, ça te fera un souvenir pour plus tard, quand on ne se verra plus ». Et c’est vrai, chaque fois que je l’ouvre, je pense à elle et je lui souris…