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mardi 19 janvier 2010

Something happened, 3 - par Flo

C’était un mardi, je crois, je n’en suis plus très sûre aujourd’hui.

Dans quelques jours, ça va faire 3 ans.

Un mardi comme un autre, la vie qui s’étire longuement, retour du travail, allumer la télé, se faire à manger, bâcler la nourriture, se nourrir sans savourer.

Et ce poids, toujours, sur les épaules, sur le coeur. Ce poids qui n'en est plus un, tant j'ai pris l'habitude de vivre avec, comme un compagnon, comme une obligation. Je tourne en rond, je cherche, je me cherche.

Il était là ce soir-là, nous avions échangé des banalités comme souvent, sans y mettre le cœur, en se forçant bien sûr.

22 heures, il était déjà sorti depuis plus d’un quart d’heure, dans l’hiver humide du Sud, promener le chien. Ces promenades qui duraient une éternité, ce besoin de prendre l’air, de sa part, de la mienne, j’étais blottie sous les couvertures, je regardais une émission quelconque, absente à moi-même, absente à la vie.

Ca a sonné d'un coup, m’a fait sursauter comme à chaque appel à cette période. Qui appelle à cette heure, mais surtout, qui appelle sur un numéro que nous ne communiquons jamais ??

Et surtout, pourquoi est-ce que je me suis levée ce soir-là, alors que j’avais laissé tant de fois retentir la sonnerie, tremblante, paralysée d’affronter la réalité, celle de l’extérieur, celle de ce monde que je ne maîtrisais pas, plus, cet univers où tout m’échappait.

J’ai décroché, mue par une force qui me dépassait, comme un noyé s'accroche à la bouée qu'on lui lance.

-J’aimerais "lui" parler s’il vous plaît
-Mais qui êtes-vous pour appeler ainsi, il est 22H30??"
-Sa copine, depuis plusieurs mois
-Ah ça tombe bien, je suis sa femme, depuis 7 ans.

Du reste, je ne me souviens guère. Mes jambes tremblaient tellement qu’il a fallu que je m’assoie. J’ai senti le même effarement en face, mais peut-être moins violent, moins bouleversant.

J’ai raccroché, et je l’ai entendue, cette voix intérieure : « si tu ne fais rien aujourd’hui, c’est ton enterrement que tu signes. C’est maintenant ou jamais, enfin, pour VIVRE. »

Tout chambouler. Quitter une ville, un boulot. Des points de repère, mais construits sur des fondations de sable. Repartir à zéro, encore, enfin. Vivre enfin, déployer ses ailes, respirer, oublier la peur, celle chevillée au corps depuis si longtemps, découvrir que cette boule énorme, sur le plexus, étouffante, n’est pas une fatalité. Se prendre en main, prendre en charge, décider, assumer, surmonter l'insurmontable, repousser des limites qui paraissaient inatteignables, apprendre à savourer, devenir légère, si légère...

Flo